1.1.  Propriétés du matériau

Comme beaucoup d’autres éléments, le silicium peut exister à température ambiante sous différentes structures, dont les deux extrêmes sont respectivement l’état amorphe et l’état cristallin. Il est habituel de considérer que le silicium polycristallin, nommé dans la suite « Si-poly », est composé d’une manière hétérogène de ces deux formes, c’est-à-dire de grains cristallins séparés par des zones amorphes.

1.1.1.  Le silicium mono-cristallin

Dans un cristal idéal de silicium les atomes sont arrangés selon la structure diamant avec une distance inter-atomique1

PIC Pour la clarté, les sites correspondant à un des deux réseaux cubique face centré s’interpénétrant l’un par rapport à l’autre sont en bleu. (Dans la structure de zinc blende les sites ombragés sont occupés par un type d’ion, et les bleus par l’autre.) Les liaisons entre les voisins les plus proches ont été tracées dans le schéma. Les quatre voisins les plus proches de chaque point forment les sommets d’un tétraèdre régulier.

FIG. 1.1: Maille cubique conventionnelle de la structure diamant d’après [3, page 76].

de d = 2,35 Å. La liaison entre les atomes les plus proches est de caractère covalent de type 3sp3. À ce type de liaison correspondent des états électroniques, qui sont couplés entre eux dans le potentiel périodique dans le cristal, conduisant à des bandes d’énergie permises et interdites pour les électrons. La bande interdite, appelée « gap » et séparant la bande permise supérieure, appelée bande de valence (BV) et pleine au zéro absolu, de la bande permise au dessus, appelée bande de conduction (BC) et vide au zéro absolu, est égale à Eg = 1,12 eV à température ambiante (figure  1.2).

PIC Le maximum de la bande de valence a lieu au vecteur d’onde (vecteur de BLOCH) k = 0, ou se rencontrent deux bandes dégénérées avec des courbures différentes. Les six minima de la bande de conduction dans la première zone de BRILLOUIN sont situés dans les directions [100]. La troisième bande, située à seulement 0,044 eV en dessous du maximum de la bande de valence, peut être une source significative de porteurs à température ambiante (kBT = 0,025 eV).

FIG. 1.2: Bandes d’énergie dans le silicium d’après [49].

Comme le minimum de la bande de conduction est repéré à un autre point dans la zone de Brillouin que le maximum de la bande de valence, on parle d’un gap indirect, contrairement au gap direct comme par exemple dans le cas du semi-conducteur GaAs.

L’importance du gap, Eg, détermine l’échange des porteurs de charge entre les différentes bandes d’énergie et ainsi les propriétés électroniques du semi-conducteur.

1.1.2.  Le silicium amorphe

Au delà du deuxième proche voisin, l’arrangement des atomes dans le silicium amorphe (a-Si) n’est plus régulier. On observe, par l’analyse de diffraction électronique, qu’un certain ordre à courte distance persiste, c’est-à-dire que le nombre des plus proches voisins reste quatre et la distance inter-atomique environ de 2,35 Å, confirmé par diffraction X [10, 19]. À cause d’une certaine distribution de la distance inter-atomique et de l’angle de liaison, des distorsions apparaissent dans le réseau, induisant une distribution des états électroniques, ce qui se traduit par l’apparition d’états localisés dans la bande interdite en haut de la bande de valence et en bas de la bande de conduction. Ils forment ce que l’on appelle les queues de bande. D’autre part, ces distorsions peuvent devenir suffisamment importantes pour empêcher une liaison de se former et ainsi donner lieu à des liaisons insatisfaites que l’on appelle également liaisons pendantes. Ce défaut introduit deux états électroniques au milieu de la bande interdite : l’un avec un électron, et l’autre avec deux électrons. On suppose des formes GAUSSIENNES pour la distribution énergétique des états de liaisons pendantes [78].

La figure  1.3


PIC Les queues de bande proviennent des distorsions dans le réseau et descendent exponentiellement dans la bande interdite. Les liaisons pendantes introduisent deux états électroniques au milieu du gap. La densité d’états varie beaucoup selon les conditions de dépôt et n’est pas forcement symétrique.

FIG. 1.3: Densité d’états en échelle logarithmique dans la bande interdite du silicium amorphe (EV  : bande de valence, EC : bande de conduction).

illustre qualitativement la densité d’états g(e) en échelle logarithmique. Les propriétés du a-Si dépendent fortement de l’importance du désordre, qui peut être très variable. Ce phénomène se traduit par des propriétés électroniques très différentes selon la méthode et les conditions de fabrication. L’intérêt pour le silicium amorphe est apparu surtout depuis que la possibilité de dopage du matériau a été démontrée. Ceci est devenu possible grâce à l’incorporation d’atomes d’hydrogène dans le réseau, qui permet entre autres de saturer un grand nombre de liaisons pendantes et par conséquent de diminuer fortement la densité d’états localisés dans le gap. On appelle ce matériau silicium amorphe hydrogéné ou a-Si:H.

1.1.3.  Le silicium polycristallin

On peut imaginer des structures intermédiaires entre ces deux états extrêmes. En particulier, il peut exister des phases constituées de l’état cristallin et de l’état amorphe, c’est ainsi que l’on défini le silicium polycristallin : ce matériau est constitué de grains mono-cristallins séparés entre eux par des zones désordonnées et riches en défauts cristallins, que l’on peut assimiler à du silicium amorphe et que l’on nomme joints de grains. Chacun de ces deux composants du Si-poly, grains et joints de grains, possède des caractéristiques propres que nous rappelons brièvement :

Parler d’un type unique de silicium polycristallin serait donc une erreur et c’est pourquoi il est toujours nécessaire de définir le silicium polycristallin selon certains critères que l’on peut résumer comme ceci :

Ces paramètres dépendent totalement des conditions de dépôt et du post-traitement (recuit, hydrogénation, etc. . .) du silicium.

Ces caractéristiques structurales inhérentes au Si-poly introduisent, de la même façon que pour le silicium amorphe, des états localisés dans la bande interdite (voir figure  1.3).